RELIEFS FUNÉRAIRES GRECS

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RELIEFS FUNÉRAIRES GRECS

RELIEFS FUNÉRAIRES GRECS

Si l’on excepte le groupe, d’ailleurs isolé et mystérieux dans l’art mycénien, des grandes stèles en calcaire qui signalaient les tombes royales du premier cercle funéraire de Mycènes (\RELIEFS FUNÉRAIRES GRECS XVIe s.), la coutume d’installer sur les tombes des stèles à décor peint ou sculpté est relativement tardive en Grèce: durant toute la période géométrique, les tombes n’ont été généralement surmontées que d’une pierre anonyme grossièrement équarrie, fichée dans le sol. Des poteaux de bois, peut-être inscrits et peints, ont pu exister aussi, mais ils n’ont laissé aucune trace. Les premiers monuments funéraires grecs connus sont les vases de taille humaine qui signalaient, au cimetière athénien du Dipylon, les tombes de l’aristocratie (\RELIEFS FUNÉRAIRES GRECS VIIIe s.); les scènes représentées sont funéraires: exposition du mort, cortège funèbre. Tandis que le développement d’une véritable plastique en pierre à partir de \RELIEFS FUNÉRAIRES GRECS 650 entraîne l’installation sur certaines tombes de statues semblables à celles qui sont dédiées dans les sanctuaires (kouroi, korai), on voit également apparaître la stèle, simple plaque de pierre dressée au sommet du tumulus couvrant la tombe; les plus anciennes stèles du Céramique, à Athènes (\RELIEFS FUNÉRAIRES GRECS 650-\RELIEFS FUNÉRAIRES GRECS 625) n’ont pas de décor sculpté, mais les traces de stuc que certaines ont conservées permettent de supposer qu’elles ont été peintes; jusqu’à la fin du \RELIEFS FUNÉRAIRES GRECS VIe siècle, certaines tombes ont d’ailleurs été ornées de plaques de terre cuite où étaient peintes des scènes semblables à celles qui figurent sur les grands vases géométriques du Dipylon. La plus ancienne stèle sculptée connue est celle de Dermys et Kitylos, trouvée à Tanagra, en Béotie; plus proche, par son très haut relief, des statues que des stèles, sa composition est très exceptionnelle: les deux jeunes gens — morts ensemble? — sont représentés côte à côte, se tenant par l’épaule. En tout cas, on voit ici s’affirmer, dès la fin du \RELIEFS FUNÉRAIRES GRECS VIIe siècle, une conception très différente de celle dont témoignaient les vases géométriques et les plaques peintes. Rien de narratif ou de dramatique, rien qui évoque la mort ou les vicissitudes de l’existence: le défunt est représenté dans la plénitude de sa vie, dans l’intensité radieuse de son être. Même si un accessoire parfois le personnalise, évoquant une profession, un goût, une habitude, il n’est jamais individualisé. On est ici aux antipodes de l’art funéraire romain issu, lui, du réalisme macabre des masques mortuaires.

Très vite, ces stèles dont le très bas relief suggère qu’elles imitent d’abord des monuments peints — sur bois, sur terre cuite ou sur pierre — ont pris, à Athènes tout au moins, une dimension considérable; avec leur socle à degrés où était gravé le nom du mort et leur couronnement à volutes portant un sphinx ailé, gardien de la tombe, elles pouvaient atteindre jusqu’à quatre mètres de hauteur; sur le fût très élancé de la stèle, il n’y a guère de place que pour le mort lui-même, représenté de profil. Est-ce un hasard si, dans une société aussi androcentrique que la Grèce archaïque, la très grande majorité des stèles conservées représentait des hommes? À partir de \RELIEFS FUNÉRAIRES GRECS 530 environ, le couronnement se simplifie: une palmette remplace le sphinx, et les stèles se font plus trapues (G. M. A. Richter, The Archaic Gravestones of Attica , Londres, 1961). Les grandes familles n’en continuent pas moins à rivaliser de luxe funéraire, au point qu’une loi devra finalement interdire les tombes exigeant «un travail supérieur à celui de dix hommes en trois jours» (Cicéron, De Legibus II, XXVI, 64): les stèles sculptées disparaissent pratiquement à Athènes entre \RELIEFS FUNÉRAIRES GRECS 500 et \RELIEFS FUNÉRAIRES GRECS 440. Un grand nombre de stèles antérieures à cette loi somptuaire ont été découvertes remployées dans le mur de Thémistocle. Mais les stèles sculptées du reste de la Grèce, dont la qualité est fonction des traditions locales, comblent ce hiatus dans la production attique. Que ce soit en Thessalie (H. Biesantz, Die thessalischen Grabreliefs , Mayence, 1965) ou dans les îles et en Ionie (H. Hiller, Ionische Grabreliefs der ersten Hälfte des 5. Jahrhunderts v. Chr. , Tübingen, 1975), on constate dans la première moitié du siècle le passage à des stèles plus larges qui permettent une mise en scène narrative: le mort est dès lors généralement représenté en compagnie d’au moins un autre personnage, parent, ami, servante ou esclave. Les stèles de femmes deviennent aussi plus fréquentes. Cet élargissement du champ sculpté entraîne assez rapidement la disparition du couronnement en palmette; il ne subsistera, jusqu’à l’époque hellénistique, que sur les stèles non sculptées qui portent seulement le nom du ou des morts (H. Möbius, Die Ornamente der griechischen Grabstelen , 2e éd., Munich, 1968). Lorsque la production attique reprend, c’est le couronnement en fronton qui s’impose d’emblée, entraînant assez rapidement la mise en place d’un encadrement architectural complet, avec deux colonnes ou pilastres et une architrave portant le nom du défunt. Ce cadre prend de plus en plus d’importance, au point de compromettre l’unité de la stèle: après \RELIEFS FUNÉRAIRES GRECS 350, les personnages sont traités en très haut relief sur une plaque souvent indépendante enchâssée dans une niche architecturale profonde. La levée de la loi somptuaire, vers \RELIEFS FUNÉRAIRES GRECS 440, correspond peut-être au souci de Périclès de procurer du travail aux nombreux marbriers formés sur le chantier du Parthénon; cela expliquerait l’extraordinaire qualité moyenne de la production attique jusqu’au début du \RELIEFS FUNÉRAIRES GRECS IVe siècle; elle varie et, s’il se peut, raffine encore les formules plastiques mises au point autour de Phidias. Un changement d’atmosphère se produit avec le nouveau siècle: le thème de la poignée de main, entre celui qui part pour toujours et l’un de ses proches, introduit, mais avec une retenue excluant tout pathétique, une nuance affective nouvelle dans ces représentations où la misère physique et morale n’a aucune place (H. Diepolder, Die attischen Grabreliefs des 5. und 4. Jahrhunderts v. Chr. , Berlin, 1931). Peu à peu, la stèle s’élargit à une réunion de famille; autour de celui qui s’en va, assis la plupart du temps, les proches sont groupés, recueillis mais sans un geste de révolte ou de déchirement. Seule la poignée de main, ou parfois moins encore: un regard pensif évoque «ce peu profond ruisseau calomnié la mort», ici franchi d’un pas paisible, avec la sérénité de Socrate. L’attrait du savoir-faire attique ne doit pas masquer la leçon d’humanité que ces stèles proposent modestement; le classicisme athénien serait incomplet sans ce pudique contre-chant à l’hymne majeur de l’Acropole.

La tendance renouvelée à un déploiement excessif de luxe funéraire, alors même que s’amorce pour Athènes un déclin irréversible, provoquera en 317 une nouvelle interdiction, celle-ci définitive. Bien que concurrencée par d’autres types de monuments (stèles peintes et gravées, sarcophages, etc.), la stèle sculptée restera jusqu’à l’époque romaine le monument le plus fréquent pour les tombes d’un certain niveau. Mais l’iconographie est désormais très pauvre (E. Pfuhl, H. Möbius, Die ostionischen Grabstelen , I, Mayence, 1977) et l’exécution de qualité médiocre: le mort, représenté debout et de face, entouré d’accessoires qui indiquent sa profession et son statut social, n’est plus qu’une silhouette stéréotypée; quant aux «cavaliers thraces» de la Grèce du Nord et aux «banquets funéraires» reproduits à des centaines d’exemplaires avec seulement quelques variantes locales (N. Firatli, Les Stèles funéraires de Byzance gréco-romaine , Paris, 1974), ils illustrent l’étiolement progressif d’une tradition que n’anime plus aucune verve créatrice.

Encyclopédie Universelle. 2012.

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